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Perret et Vibert
La maison des Bambous

1879-1994

La Maison des Bambous est une société de grande importance dans l’histoire du mobilier français d’inspiration extrême-orientale. Cette société s’adonne d’abord exclusivement à la création de meubles dans un goût chinois-japonais avant de s’orienter vers la négoce d’objets d’art provenant de Chine et du Japon, deux activités qui ont concouru à sa grande réputation en France et dans le monde au tournant des XIXème et XXème siècles. Si l’étude de l’annuaire du Commerce de Didot-Bottin rend possible la reconstitution historique de la Maison, celle des journaux de l’époque nous permet d’apprécier la réputation de la Maison et de rester au plus proche de ce qu’elle fut auprès de ses contemporains.

1874

Les débuts : Alfred Perret père

En 1874, apparaît pour la première fois dans l’annuaire un certain Perret. Il est alors désigné en tant qu’ébéniste, au 22, rue de la Roquette, à Paris. En 1879, alors que l’ébéniste Perret n’apparaît plus, un dénommé A. Perret est signalé dans la catégorie « Articles en Bambous ». Situé au 30, rue du Quatre-Septembre, dans le 2ème arrondissement de Paris, il est spécialisé en « meubles en bambous, vannerie de luxe, jardinières, guérite, natte japonaise ». Aussi pouvons-nous affirmer que la société de Perret est dès ses débuts orienter vers la création de meubles d’inspiration asiatique, en accord avec le goût de l’époque. Cette courte notice nous apprend également la présence d’Alfred Perret à l’Exposition Universelle de 1878, ce qui prouve qu’il était déjà reconnu pour son activité à cette date.

L’année suivante, il est également inscrit dans la catégorie du Didot-Bottin « meubles et décoration de parcs et jardins » en tant que fabricant « de chaises, fauteuils, canapés, tables en osier, nouveaux meubles pour jardins, en rotin et bambous, guérites en osier ». On peut en déduire un élargissement du champ d’activité qui semble se confirmer en 1882 : non seulement les éléments proposés à la vente se font de plus en plus variés, mais surtout Alfred Perret fait son apparition dans deux autres catégories : « ameublement » et « sièges, chaises et fauteuils ». Par ailleurs, il n’est plus situé au numéro 30 mais au numéro 33, rue du Quatre-Septembre, adresse qui restera le siège social de la maison jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale.

1884

Le début des meubles japonisant

A partir de 1884, l’activité se développe encore en s’étendant aux « meubles de fantaisie » et un an après est utilisée dans cette même catégorie la dénomination de   « petits meubles de salon en bambou et laque, meubles chinois et japonais ». Nous situons ainsi à cette époque le début de la fabrication de meubles en bois sculpté, notamment pour ceux d’inspiration asiatique. Certaines de ces créations seront d’un aspect formel très proche de Gabriel Viardot. Toutefois, la principale fabrication de la maison restera, jusque dans le milieu des années 1890 au moins, le fauteuil et la chaise en rotin et en bambou.

1886

Perret père et fils et Vibert

La société prend le visage que nous lui connaissons en 1886, année où apparaissent le fils d’Alfred Perret, du même nom, ainsi que Ernest Vibert, devenant « Perret père et fils et Vibert ». L’acte officiel de création sera signé le 31 mai 1890 par Maître Mouchet. Ce même document nous apprend toutefois qu’un acte reçu par ce même notaire établissait le 14 avril 1885 l’exploitation d’un fonds de commerce entre les trois protagonistes. La société est alors formée pour une durée de sept années à compter du 1er avril 1890. Son capital social est fixé à 225 000 francs, avec une contribution par personne de 75 000 francs. Perret, père et fils, et Vibert sont associés à part égal : chacun d’eux recevra une somme de 500 francs par mois, et les bénéfices mais aussi les pertes seront partagés par tiers une fois par an. Il est par ailleurs établi que la société devra être tenue et administrée collectivement par les trois associés, avec cependant quelques précisions : Perret Père est en charge de la caisse sociale et de la comptabilité de la maison, et, en cas de défaut de ce dernier, il sera remplacé par Ernest Vibert.

1887

La vente de Chinoiseries et Japoneries

Le Didot-Bottin nous apprend une nouvelle activité de la maison qui vend dès 1887 des « Chinoiseries et Japoneries » : en plus de présenter leurs créations, ils proposent à leur clientèle de véritables objets de provenance extrême-orientale parmi lesquels des bronzes, des porcelaines, des objets en ivoire, en jade, en laque… qui feront dire au critique Carel du Ham qu’il s’agit là d’un « véritable musée où la plus difficile fantaisie trouvera sa satisfaction ».

 

1885-1887_bijou_théatre

Publicité parue dans Bijou-Théâtre en 1885

1889

L'Exposition Universelle à Paris

La maison participe à l’Exposition Universelle de 1889 et remportent deux médailles d’argent, plus haute récompense accordée à leur industrie.

1894

L’Exposition d’Horticulture et l’Exposition Universelle, Internationale et Coloniale de Lyon

A partir de 1894, la maison figure sous le nom de « Perret et Vibert » seulement : il semble donc qu’Alfred Perret ait quitté l’affaire, la laissant à son fils et à Ernest Vibert.

Cette même année, ils participent à l’Exposition d’Horticulture aux Tuileries durant laquelle ils obtiennent le premier prix pour leurs meubles de jardins et de serres. Ils y reçoivent par ailleurs la visite de l’impératrice Eugénie, accompagnée de M. Piétri et de la Princesse Mathilde qui leur commande un ensemble de mobilier pour sa propriété de Saint-Gratien.

De plus, la maison expose une sélection de la collection de Chinoiseries et Japoneries à l’Exposition Universelle, Internationale et Coloniale de Lyon de la même année, dans la section permanente des colonies. Elle y présentera divers éléments tels que des colonnes, des panneaux, des parasols, des boucliers, un bambou gravé et peint, un panneau en bois sculpté, un meuble avec incrustations, un lampadaire en cuivre ciselé d’Indochine, un panneau de laque rouge du Tonkin, un meuble incrusté Tonkin.

1895

L'Exposition à la galerie

En 1895, la société prend son nom définitif de Maison des Bambous, et en mai de la même année, Perret et Vibert organisent avec succès une « exposition des meubles et sièges de campagne pour châteaux et villas ». L’impératrice Eugénie, qui figure parmi les clients de marque réguliers de la galerie, s’y rend à nouveau, cette fois pour approvisionner sa villa du cap Martin. Mlle de Marsy, actrice mondaine de la Comédie Française, y achète « un ravissant mobilier Louis XV en rotin laqué blanc et or » et le duc de Montmorency,  acquiert des objets d’art de Chine. Leur collection d’objets asiatiques est en effet, autant que leur production originale, fortement appréciée par leurs contemporains.
En octobre 1895, c’est un autre invité d’honneur que reçoit la galerie : le roi de Grèce Georges Ier, qui « choisit une variété de ces jolis petits meubles et sièges en bois sculpté et en bambou décoré » ainsi que des paravents bordés et plusieurs pièces en bronze et en porcelaine du Japon pour son palais d’hiver près d’Athènes.

Clientèle prestigieuse

La Maison des Bambous fournit également des sièges et des tables pour les prestigieux yachts Eros et Britannia appartenant au Prince de Galles.
La duchesse de Montpensier vient quant à elle s’approvisionner rue du Quatre-Septembre pour son château de Séville « de stores du Japon, perlés, destinés à tamiser la lumière dans les galeries et jardins d’hiver, des sièges en cuir et bambou aux tons chatoyants, des vasques superbes en cuivre ciselé, style Louis XV et Louis XVI, rehaussés de fleurs de lys ».
L’américain Vanderbilt, membre de la famille iconique du Gilded Age aux Etats-Unis, commande pour le réaménagement de son hall et de sa serre à New-York toute une collection de sièges en rotin, de jardinières, de meubles de fantaisie en bambou naturel, des paravents et des objets d’art du Japon.
En 1896, c’est la reine du Portugal, Amélie d’Orléans, accompagnée de Mme de Vasconcellos, qui acquière divers objets destinés à son palais de Cascades, ainsi que le maréchal Yamagata, militaire et homme d’État japonais très influent dans la vie politique et militaire du Japon de l’ère Meiji. Ce natif nippon est séduit par leur immense collection d’objets de provenance extrême-orientale mais surtout par la fantaisie que la Maison a su donner à l’art asiatique, à tel point qu’ « il lui a été impossible de dissimuler son admiration ».

De nombreux étrangers (américains, anglais, espagnols et italiens notamment) affluent également en masse dans la galerie après avoir fait la découverte de leurs créations dans les Casinos et les hôtels guindés de Paris et des villes d’eau. Ces lieux de loisirs et de mondanités sont en effet à l’époque de véritables vecteurs du bon goût, jouant ainsi un rôle quasi publicitaire dans le domaine des arts décoratifs.

1900

L'Exposition Universelle

Perret et Vibert participent également à l’Exposition Universelle de 1900 dans la section des « Meubles de luxe et meubles à bon marché ». Ils sont récompensés d’une médaille d’argent pour leurs « meubles laqués et marquetés très soignés » construits principalement en bambou.

1903

Les aquarelles

La Maison présente à partir de 1903 des maquettes très finies en aquarelle pour donner l’indication exacte du résultat, puis se charge des installations complètes. Ces maquettes sont pour nous une véritable mine d’or. Elles nous permettent d’apprécier les techniques commerciales de Perret et Vibert, leur véritable talent pour les compositions d’intérieur ainsi que la diversité des productions de la société qui propose un vaste choix d’objets tous uniques. Pour Perret et Vibert, il ne s’agit donc plus seulement de vendre des objets de manière éparse mais de vendre des aménagements entiers et harmonieux dans lesquels les clients peuvent d’ores et déjà se projeter. En un mot, Perret et Vibert semble avoir voulu créer l’intérieur idéal, harmonieux et cohérent.

Perret-vibert

Au travers de ces aquarelles se décèlent ainsi le style Perret et Vibert que l’on peut résumer, en reprenant les mots d’un critique de l’époque, comme « le confortable parisien agrémenté d’une jolie nuance de fantaisie exotique ». Dans des intérieurs coquets où se diffuse une douce lumière, ont été disposés avec une certaine science de l’aménagement les meubles, les décors et autres tentures, peints avec un grand soin apporté aux détails. Le choix de la technique de l’aquarelle n’est par ailleurs pas anodin, elle qui fait écho aux délicates estampes chinoises et japonaises qui, depuis un demi siècle maintenant, ont envahi l’Europe. 

1911

Dernier changement de nom

En 1911, le nom est à nouveau modifié pour  « Galerie d’art Perret et Vibert »

1917

Dernier déménagement

En 1917, le nouveau siège de la maison est déplacé dans la succursale du 170, boulevard Haussmann, acquis quelques années auparavant en 1893.
La société est par la suite reprise par Gaston Vibert, le fils d’Ernest. 

1994

Fermeture de la boutique

La Maison ferme ses portes en 1994 mais jouit aujourd’hui d’une certaine réputation notamment pour ses créations du siècle dernier, reflets du goût pour les contrées lointaines comme d’un certain art de vivre élitiste. 

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Publicité parue dans Le Cri en 1913

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